FOYERS

VERNISSAGE LE 21 MAI

Le 21mai : un an et un jour après l'incendie

EN FIN

Le jeudi 20 mai, Raphaël et moi avons quitté le Nord en voiture, il était 20H. 
Nous avions déjà suivi plusieurs fois cette route (déserte, cabossée), mais nous nous sommes quand même un peu égarés. Peut-on vraiment perdre du temps ? Notre discussion nous rendait inattentifs à la route, le jour tombait. 
Vers une heure du matin, nous avons fait halte, à proximité de Troyes. Fatigue, d'avoir fini le film et les montages son quelques heures à peine avant le départ, fatigue, d'avoir déjà fait ce long aller-retour quelques jours auparavant, pour commencer l'installation à la Maison Pour Tous, fatigue, de la route et de l'obscurité. 
Le vendredi 21 mai, nous sommes arrivés à 11H à Monthureux-sur-Saône. Le printemps ce jour-là était d'une qualité explosive et douce. Nous avons vu les oiseaux de proie perchés sur les clôtures, les insectes accrochés aux herbes. L'air se balançait dans le vent.
La journée entière a été consacrée à l'installation. 
Heureusement, sur place, il y avait main forte. Sylvie a installé les tables du buffet. Maryse a cueilli des fleurs dans les champs pour décorer ces tables. J'ai recouvert un grand mur de photos, de dessins, de textes. Jean-Marie, Raphaël, Anaïs, Dominique et Marie-Pierre ont installé des tables, disposé la centaine de chaise, fabriqué un studio photo, posé des guirlandes, disposé et numéroté des dessins sur les tables, réglé la sono des trois amplis et réglé l'image des deux vidéoprojecteurs, préparé le pique-nique, disposé les micros sur l'estrade. Je crois que nous avons fini juste à temps. 
À 19H, le public arrivait, par dizaines, et moi je transpirais encore. Je ne m'attendais pas à voir tant de monde. Les habitants du foyer étaient sapés comme des princes. Robes, bijoux, cravates, chaussures cirées, vernis à ongle. Nous nous sommes tous assis dans cette joie légère, un peu électrique. Y'a des cadeaux?, criait Éliane. 
Noir. 
Les uns à la suite des autres, dans l'ordre de proximité au peuple, les hommes politiques ont parlé. À ma demande, le maire, Monsieur Magnien, avait mis son écharpe bleu blanc rouge. Je voulais marquer cette cérémonie de tout le sérieux et le protocole dont nous étions capable. Puis, les trois conseillers généraux, Monsieur Langloix, Monsieur Gerecke, Monsieur Roussel. Angélique les interpelle. Vas-y Alain! Il est beau, lui! Il y a un lien inhabituel qui se crée, un pont depuis la salle jusqu'à l'estrade. Merci, nous en avions tous besoin. Et des joues se colorent. 
Jacques fait un discours, Jacques représente les résidents. Je suis émue de cette adresse directe qu'il me fait, des souvenirs qu'il soulève (notre premier entretien, son jardin, sa chambre brûlée), émue aussi de cette manière qu'il a, de dire les choses comme ça, paf, linéaire, sonore, tenant sa feuille bien droit devant lui, cachant à demi son visage, pour lire précisément et sans erreur les mots qu'il a préparé. Monica Deflesselle parle à son tour. Les résidents ont préparé un cadeau pour moi, une plante spéciale, une plante à mots. Merci. Aujourd'hui elle vit chez moi, j'espère qu'elle grandira. Comme rarement, tous les gens que je veux remercier sont dans la salle. 
C'est à nous. 
Ciné-concert de 35 minutes, voix off en direct (Marie Bouts), bande-son en direct (Raphaël Godeau, guitare), sur un montage image (dessins animés, textes et photographies) : le film s'appelle "FOYER". Les résidents font des commentaires, rient, se moquent et se congratulent, sont attentifs. Il y a une bonne écoute. Fin. 
Nous enchaînons sur la grande  TOMBOLA. 
J'ai signé, numéroté et encadré les 58 dessins originaux qui correspondent au script du film. Chacun leur tour, les résidents tirent un numéro dans un chapeau (voir la définition de « hand in cap ») et gagnent le dessin correspondant. De cet original, ils peuvent faire ce qu'ils veulent (le vendre, le donner, l'exposer, le détruire). Je leur signe des « certificats de don d'oeuvre d'art ». Maintenant, collectivement, ils sont propriétaires de l'intégralité de ce que j'ai produit en les rencontrant : les photographies, le script du film, le film. Ainsi, ils ont les moyens d'exploiter ce travail pour leur compte, de le montrer, le vendre, etc. Ils sont les propriétaires de pièces d'art contemporain. 

Deux choses étaient très importantes pour moi dans ce travail : d'une part, transformer la valeur argent (que j'ai reçue du conseil général pour financer mon travail) en valeur artistique, que je transmet à mon tour aux résidents ; d'autre part fabriquer un objet artistique qui ne soit pas un discours sur des personnes (en situation de handicap mental) adressé à d'autres personnes, mais fabriquer un discours sur des personnes (en situation de handicap mental) s'adressant à ces personnes mêmes. Aujourd'hui, ces gens ont la possibilité de gérer la diffusion du travail documentaire qui a été réalisé les concernant. 

À 22H, nous avions fini de tout démonter. 
Ça a été une drôle de sensation d'achever en deux heures un travail qui nous a pris huit mois, et qui nous a travaillé si profondément dans nos êtres. 

Pour finir, je voudrais préciser une chose : jamais je n'ai fait ce travail dans une visée thérapeutique. Mon travail est uniquement artistique et c'est en ça que je le trouve utile (à fortiori dans un établissement où tout acte est dédié au soin ou à l'éducatif).


EVENEMENT : DEUX AILES BRÛLEES

Le 20 mai 2009, en fin d'après-midi, le feu s'est déclaré dans les ailes B et C du Foyer d'hébergement pour personnes handicapées, à Monthureux-Sur-Saône, dans les Vosges.
Les résidents ont eu le temps de sortir, mais tout ce qu'ils possédaient a brulé.
Après cet événement, le Conseil Général des Vosges, désireux de substituer au processus de destruction l'amorce d'un renouveau, a imaginé une association entre l'EPISOME et un artiste plasticien. C'est ainsi que depuis le mois de septembre, je travaille au foyer. Je recueille les souvenirs, je reçois les récits du présent, je rencontre la communauté telle qu'elle s'est réorganisée depuis l'incendie. 
 


DERNIÈRE LIGNE DROITE

Tout finir pour demain, résoudre les problèmes techniques (merci Lou), installer la sono et le vidéoprojecteur (merci Monsieur Chrétien et Monsieur Niklaus), manger en même temps qu'on travaille, travailler en même temps qu'on dort, ne rien oublier.

RELIÉS

Depuis quelques jours, il y a internet au foyer d'hébergement.
BONJOUR à vous, qui pouvez enfin lire tout ça.
Je n'écris pas beaucoup, en ce moment : c'est la course pour finir le projet à temps (21 mai)
Mais je suis là

FABRIQUES

à gauche : fabrique des images / à droite : fabrique des sons
Dehors : les giboulées de mars alternent soleil et pluie
ciel gris, brique rouge rouge.

PRINCIPES

Fin mars : je suis toujours à la recherche de la meilleure manière pour fabriquer les images du dessin animé. C'est complexe et stimulant. Je prends beaucoup de retard par rapport à ce que je m'étais imaginé - mais je crois que j'avais idéalisé l'affaire : comme si j'allais pouvoir fabriquer un dessin animé, même court, en trois mois!!!

Essai 1 (appareil photo) et Essai 2 (scanner)


Les images au scanner sont plus stables que les images photographiées, autant dans le mouvement que dans la lumière. Mais au scanner, en contrepartie, c'est trop rigide, moins nerveux, moins impulsif qu'avec l'appareil photo, qui me prend directement dans la fabrication de l'image. Alors j'ai dû inventer un système pour stabiliser l'image photographiée, pour caler le cadrage (pupitre) et la lumière (gros spot de jardin). Ça sera plus roots mais j'aime mieux ce rapport à l'instant, au bricolage, à la matière (je travaille avant tout sur papier et pas sur ordinateur). 
C'est ce que je cherche avec ce travail : à me sortir de mes ornières de minutie et de lenteur, à être dans du brut, de l'instantané. Hier j'ai entendu une phrase, à la radio, par une dame aux perroquets : "l'humour et le bricolage nous aident à reprendre prise avec le réel concret".


BUREAU DE MARS (2)


21 AVRIL : FRAC ALSACE, SÉLESTAT

À l'occasion de la formation "Partager l'art contemporain, regarder, écouter, faire voir", je parlerai du projet FOYER dans le cadre d'une présentation plus générale de mon travail.

NOUS

Pour avoir le droit de diffuser l'image des résidents, j'ai écrit une lettre aux tuteurs.
Après plusieurs mois d'échanges, de rédaction de documents, de demandes auprès du tribunal d'Épinal, le personnel de l'EPISOME a enfin pu demander aux habitants du foyer, un par un, s'ils acceptaient que les images que j'ai fabriquées avec eux soient diffusées. Certaines autorisations sont encore dans les tuyaux, mais bon nombre des résidents ont signé.
J'ai juste envie, ici, de parler d'une seule personne : Monsieur P était d'accord pour que son image soit diffusée, mais sa famille, qui est aussi son tuteur légal, a refusé pour lui.
Avec ce processus de signatures, pour la première fois depuis que je travaille avec des personnes sous tutelle ou dans des institutions, une famille m'a contactée (une soeur). C'est heureux.
Mais j'ai décidé de ne poster aucune photo des résidents sur ce blog. Les images, que j'ai fabriquées chez eux, avec eux, je ne veux pas qu'elles risquent d'être séparées de leur contexte, et du processus dans lequel elles s'incluent. Si je les montre, c'est que je les accompagne physiquement.

17 MARS : CONTREXÉVILLE

6H09. Le soleil se lève sur les Vosges. Ici il y a encore le froid, la gelée blanche. J'ai vu la banlieue de Nancy s'étirer, et les bois petit à petit se soustraire aux centres commerciaux, aux hôtels première classe et aux fastfood de la périphérie. À la surface du sol, une brume, parfois des touffes d'herbes sur sol marécageux. Et des arbres nus, et des fermes isolées, des éoliennes. Ruisseaux, haies, taillis : le silence des champs juste après le lever du jour.


Contrexéville, Mercredi 17 mars : de ce jour de colloque sur la « bientraitance » dans le cadre de la « semaine de la santé mentale », j'ai appris plusieurs choses. D'abord et avant toute autre remarque, j'ai appris comment ce corps de métiers (ceux du soin) se réfléchit et se remet en question, sollicitant des savoirs variés (philosophie, droit, acteurs de terrain, psychologie, psychiatrie – notons quand même qu'il n'y avait là que les représentants des métiers les plus hauts gradés de la hiérarchie...), remettant aussi en question l'État, principal financeur et pourvoyeur de nouveaux concepts (comme ce néologisme auquel nous réfléchissions aujourd'hui : « la bientraitance »). Comment travailler avec (ou contre) ce que l'État impose en toute méconnaissance du terrain ? Parce qu'il a bien été question de résistance. Rien de bien différent avec les arts et la culture, jusque là. Pourtant, j'ai été saisie : ici, les individus, indépendamment de la hiérarchie et des corps de métiers, ou bien à travers ceux-là, public compris, se pensent comme un collectif, travaillant à comprendre et améliorer les conditions dans lesquelles ils travaillent et les raisons pour lesquelles ils travaillent. Je ne suis pas là pour évaluer à quel point ils y parviennent ou non, ou à quel point le collectif dans lequel ils s'inscrivent est juste ou équitable (je n'en ai d'ailleurs pas les moyens), mais le contraste avec la solitude, la flexibilité et la concurrence qui règnent dans les métiers de l'art m'a frappée. Alors, certes, nous avons moins de hiérarchie... Mais pour le moment la question n'est pas là. Savons nous, nous aussi, nous penser comme un collectif ? Savons-nous nous adresser à d'autres (à l'État, par exemple) comme collectif ? Je me demande depuis longtemps pourquoi, nous, artistes, n'avons pas cette capacité à convoquer à nos tables rondes les métiers de la loi, qui pourraient nous expliquer comment nous fonctionnons (et comment nous pourrions manoeuvrer à partir de tout cela). Comment nous organiser ? Quelqu'un, docteur en droit, m'a un jour parlé d'un paradoxe qui, selon lui, rassemble les artistes : nous réclamons sans cesse (entre nous) un statut moins précaire, et pour autant dès qu'il s'agit de penser une norme, nous nous échappons. Je comprends et ressens cette nécessité dans la pratique artistique, explorer l'extérieur du cadre, refuser la normalisation, mais pourquoi l'étendre aux conditions juridiques, sociales, de notre pratique ? Hem. Suis-je moi-même pour autant capable de « faire groupe » ? Dès que j'entends le mot « collectif », la maladie de l'électron libre me reprend... Mais voilà ce qui m'a frappée aujourd'hui.
Quant au contenu de cette journée, dense, riche, sans mots mâchés : des questions que d'autres sauraient expliquer mieux que moi : la maltraitance institutionnelle, l'éthique, le pouvoir du soignant sur le soigné (« au nom de quoi, toi qui me soignes, t'autorises-tu à vouloir mon bien ? »). Et cette question, qui plane un instant et se suspend durablement dans la salle, dans ma tête : convient-il, sous prétexte de bientraitance, de faire taire les marginaux ?


BUREAU DE MARS

Je pose la structure générale du script.
Début, milieu et fin. Pics, creux. 
Certains passages, je ne pourrai les imaginer que lorsque j'aurai fini les montages sonores.



DANSE

Début mars, j'en suis encore à peaufiner le script du dessin animé.
Aujourd'hui : comment faire danser un personnage.

9 MARS : ESPACE KHIASMA, PARIS

RENCONTRE ENCORE ! N°2
Art et Santé : pour rompre avec l'isolement
Mardi 9 Mars 2010 à 18h00

La deuxième rencontre du cycle Encore !, consacré aux actions artistiques innovantes dans les différents espaces de la société, est dédiée à la question de la santé. Alors que l’Art à l’hôpital émerge aujourd'hui comme un enjeu central des politiques publiques, ce temps de rencontre propose de s’intéresser à différentes expériences artistiques qui travaillent dans et en dehors d’institutions médicales autour de l’exclusion lié à la maladie. Regards croisés entre des propositions singulières d’artistes, des parcours de création au long cours, des associations inscrites à l’hôpital et des professionnels qui travaillent sur les conditions d’une politique culturelle ambitieuse à l’hôpital.

Trois tables rondes suivies chacune d'un débat avec la salle
18h00 : Table ronde n°1 :
L’artiste, corps étranger dans l’institution ?
Comment les artistes continuent d'innover dans un cadre institutionnel ? Comment le regard singulier de l'artiste est révélateur d'une situation, créateur de nouvelles dynamiques dans un projet d’établissement et d’un nouveau champ de relation entre les patients et les équipes soignantes ? Quel espace de dialogue inventer entre les différentes attentes des personnes impliquées ? Des artistes font le récit d'expériences en parlant de leur approche, des contraintes, des obstacles rencontrés et des chemins de traverse inventés pour faire vivre des projets singuliers. Récits d'expériences de :
Marie Bouts
Collectes de récits et images au Foyer d'hébergement pour personnes handicapées de Monthureux-Sur-Saône (Vosges)
Matthieu Dibelius
Ateliers sonores avec des ados touchés par le SIDA (Bobigny)
Ateliers d'expression par la photo avec des adultes en situation de handicap (Paris 20ème)
Marc Pataut
Travail photographique dans l’unité pédopsychiatrique de l’hôpital Esquirol à Limoges
- - - - - - - - - - - - - - - - - -- - - - - -- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
19h30 : Table ronde n°2 :
Dedans / Dehors : quels enjeux ?
Expériences de projets artistiques qui impliquent des patients en dehors de l’institution.Récits d'expériences de :
Nicole Charpail / Association Miss Griff
Projets d’écriture et de création théâtrale avec des personnes en suivi psychiatrique ou en situation d’errances sociales (Montreuil)
Madeleine Esther
Comédienne et infirmière en psychiatrique. Artiste en résidence à la Maison des Métallos (Paris)
- - - - - - - - - - - - - - - - - -- - - - - -- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
21h00 : Table ronde n°3 :
Construire une politique culturelle ambitieuse à l’hôpital.
Tout en reprenant les enjeux des deux premiers échanges, cette troisième table ronde s’intéresse plus spécifiquement aux différentes stratégies d’inscription pérenne des actions artistiques dans le cadre d’institutions de santé.
Récits d'expériences et débat avec :
Dominique Spiess
Association Culture & hôpital, chargée d’enseignement au Cnam
Association les Mêmes / La Blanchisserie.
Association Art dans la cité
Festival Européen des arts visuels à l'hôpital

-------------------------------------------------------------------------------------------------------------
ENCORE ! qu'est-ce que c'est
Encore ! est un cycle de rencontres publiques conçues par Khiasma et l'association Un Sourire de Toi et j'quitte ma mère. Encore ! vise à explorer les nouveaux territoires de l'action artistique à partir d'expériences innovantes développées dans le champs social, éducatif ou sanitaire. Il s'agit de créer une boîte à outils mutualisée permettant aux artistes, aux institutions, aux porteurs de projets, aux personnels médicaux, aux travailleurs sociaux, aux chercheurs, aux étudiants de se rencontrer autour de partages d'expériences et de débattre de nouvelles perspectives collaboratives. Chaque rencontre donnera lieu à des partenariats avec des structures actives dans ce domaine et souhaitant valoriser une entrée thématique particulière.
Encore ! fonctionne ainsi comme un label pour des territoires de pratiques innovantes et critiques où l'exigence artistique est mise en tension avec des enjeux de transformation de la société.
Ces rencontres constituent la trame d'un ouvrage synthétique à paraître à clôture du cycle.

-------------------------------------------------------------------------------------------------------------





SCRIPT ET CARTES SONORES

Je rassemble les données sonores dans de grandes cartes synthétiques.
La matière collectée est dense, profonde.
J'essaie d'y voir clair, de séparer les choses, de faire des thèmes, des tas, des groupes. C'est toujours un moment difficile, laborieux.

SCRIPT



BUREAU DE FÉVRIER N°2 : MUR

AUTORISATIONS EN COURS (4)

Ce matin, j'ai reçu ce message de Monica Deflesselle
Bonjour Marie,
J'ai recueilli, pour le moment, le consentement de nombreux résidants dont je vous indique les noms (prénoms) si cela peut vous avancer. Jean-Pierre B, Pierre R, Corinne K, Jacques D, Marie-Rose K, Michèle V, Maurice M, Angélique S, Christian J, Josette D, Pascal D, Robert A, Jennifer G, Jeanine R, Guy P, Nadine B, Thierry J, Yannick F, Carole B, Jean-Luc B, Bernadette G, Fatma M, Bernard S, Claude D, Benjamin D, Thierry F, Sylviane H, Fabienne H, Pascal C,  Farid C, Monique G, Nadia R, Karim Z, Jacqueline M. 
Un refus annoncé à ce jour : Ginette E. Elle a réfléchi mais semble craincre un engagement qu'elle ne pourrait assumer.
Je poursuis ma quette de signatures pour les uns et attends le consentement du juge ou des tuteurs "famille" pour les autres.  Je vous informerai au jour le jour des avancées.
J'établirai les documents signés en trois exemplaires. 
Bon travail et à bientôt
Monica Deflesselle

AUTORISATIONS EN COURS (3)

Bonjour Marie,
Le formulaire d'autorisation relatif au droit à la diffusion d'images convient.
Je commence donc à les faire signer par les résidants qui le souhaite.
L'ATV a répondu favorablement pour ceux et celles qui ne sont pas en capacité de signer, à savoir Nadia R, Karim Z, Jacqueline M.
Je vous donne réponse au plus vite pour les autres.
Monica Deflesselle

BUREAU DE FÉVRIER

Script : extérieur, jour. Hiver. 
Comment emmener le spectateur ?
Comment représenter des groupes ?

Je cherche : je voudrais aussi mettre en scène mes propres bizarreries.

AUTORISATION EN COURS (2)

 AUTORISATION D'UTILISER DES PHOTOGRAPHIES ET DES ENREGISTREMENTS SONORES

Je soussigné(e),
NOM
PRÉNOM
ADRESSE
donne l'autorisation à l'artiste plasticienne Marie Bouts, engagée par le Conseil Général des Vosges dans le cadre d'une commande (marché public passé selon la procédure adaptée en application de l'article 30 du Code des marchés publics),
  • de publier, exposer, diffuser la ou les photographies prise(s) par elle et me représentant,
  • d'exposer et diffuser les enregistrements sonores réalisés par elle avec mon concours
pour les usages suivant :
  • Réalisation d'un diaporama qui rende compte de l'expérience menée au foyer d'hébergement spécialisé et médicalisé (EPISOME) de Monthureux-Sur-Saône
  • Réalisation d'un court film d'animation qui rende compte de l'expérience menée au foyer d'hébergement spécialisé et médicalisé (EPISOME) de Monthureux-Sur-Saône
  • Réalisation d'une exposition de photographies qui rende compte de l'expérience menée au foyer d'hébergement spécialisé et médicalisé (EPISOME) de Monthureux-Sur-Saône
  • Publication sur un site internet : adresse du site http://foyers88.blogspot.com
  • Réalisation de la communication (affiche, prospectus, messages web) accompagnant les oeuvres citées ci-dessus
Cette autorisation est valable sans limitation de durée.
Les légendes accompagnant la diffusion de la ou des photographies ne devront pas porter atteinte à ma réputation ou à ma vie privée.

Le ............................................... à .............................................

Signature :


Je soussignée MARIE BOUTS, demeurant au....................

Je m'engage à respecter les volontés de
NOM
PRÉNOM
ADRESSE
Pour la réalisation et la diffusion de l'oeuvre qui m'a été commandée par le Conseil Général des Vosges (marché public passé selon la procédure adaptée en application de l'article 30 du Code des marchés publics). Je m'engage à ne jamais utiliser les photographies et les enregistrements sonores de …......................................................... pour un tout autre projet que celui qui concerne l'expérience menée au foyer d'hébergement spécialisé et médicalisé (EPISOME) de Monthureux-Sur-Saône, en collaboration avec les personnels et les résidents.
Cet engagement est valable sans limitation de durée.

Le …................................................ à …...........................................

Signature :

LA SEMAINE DE LA SANTÉ MENTALE

Bonjour Marie,
Je vous fais part de notre inscription à la journée consacrée à la bientraitance, qui aura lieu le 17 mars 2010 à Contrexeville (salle G. Brassens).
Cette journée entre dans le cadre de la semaine de la santé mentale.
Lors de cette journée nous aurons la possibilité de présenter le diaporama.
Programme :
8h30/9h Accueil des participants (dont nous même)
9h/9h30 Ouverture de la journée
9h30/11h30 Présentation de diverses expériences et initiatives dans l'Ouest Vosgien
- Expérience Colibri
- La place et le rôle du GEM
- Prise en compte d'un séisme institutionnel dans la vie des résidants de l'EPISOME
- L'accompagnement des majeurs protégés
11h30/12h La bientraitance en institution
12h/14h Repas
14h/14h30 les aspects philosophiques de la bientraitance
14h30/15h les aspects juridiques de la bientraitance
15h/15h30 Pause
15h30/16h les conséquences perverses de la bientraitance
16h conclusion
Je vous souhaite une bonne journée et je vous recontacte prochainement.
Monica Deflesselle

ÉCOUTE

Un long travail d'écoute : plus de 24 heures d'enregistrement (1,1jour)
Avec toutes ces voix dans mes oreilles et dans ma tête, je me sens peuplée.
Je pense à vous.

TROISIÈME SÉJOUR

Du 31 décembre 2009 au 4 janvier 2010, je me suis rendue tous les jours au foyer.
Raphaël Godeau m'accompagnait.
C'était la pleine lune.
Nous avons partagé le repas du réveillon avec les habitants du foyer : merci à vous pour votre accueil.

LA MAISON POUR TOUS DE MONTHUREUX SUR SAÔNE

Le 4 janvier, Monica Deflesselle, Maryse Moreau-Lallement, Raphaël Godeau et moi-même avons rencontré Monsieur le Maire de Monthureux-sur-Saône, Monsieur Raynald Magnien. Ensemble, nous sommes allées visiter la Maison Pour Tous : c'est dans cette grande salle que nous organiserons, en mai, le vernissage de l'exposition qui clôturera le projet.
Merci Monsieur le Maire
Merci la commune de Monthureux.

COMPTE-RENDU OFFICIEL N°3

Bonjour Madame, Bonjour Monsieur,
Je me suis rendue au foyer d'accueil spécialisé et médicalisé de Monthureux-sur-Saône du 31 décembre 2009 au 4 janvier 2010. J'étais en compagnie de Raphaël Godeau, qui a, vous le savez déjà, accepté de prêter au projet son savoir-faire dans le domaine sonore et musical.
Nous avons été chaleureusement accueillis : les résidents ont partagé avec nous leur repas du réveillon, et ils se sont, encore une fois, prêtés au jeu de la photographie et de l'entretien enregistré avec un plaisir visible. Au fil du travail et des rencontres, des liens se sont noués : nous faisons partie de leur paysage, maintenant, autant qu'ils font partie de nos vies.
Ce séjour clôt les sessions de travail à Monthureux : les dernières images, les derniers sons ont été enregistrés. Ainsi s'achève la phase de travail commandée par le Conseil Général des Vosges, à savoir le recueil des histoires de vie. À présent, les habitants du foyer et les personnes qui y travaillent attendent le résultat. Pour moi, ainsi que pour Raphaël Godeau, ce seront des mois de conception et de réalisation. Deux rendez-vous ont été pris pour 2010 : Les 18 et 19 mars 2010, Madame Deflesselle et moi-même irons raconter notre aventure (diaporama à l'appui), lors de la semaine de la santé mentale, à Vittel et Remiremont. En mai 2010, nous clôturerons le projet lors d'une exposition ouverte au public, à la Maison Pour Tous de Monthureux-sur-Saône.
Madame Deflesselle, Maryse Moreau, Raphaël Godeau et moi-même avons rencontré Monsieur Raynald Magnien, maire de Monthureux-sur-Saône, le lundi 4 janvier.
La commune s'est énergiquement associée à notre projet, en nous prêtant, pour le vernissage du mois de mai, la Maison Pour Tous, du matériel de projection et du matériel de diffusion sonore. Nous pourrons également compter sur l'appui technique d'un agent municipal, pour le montage et démontage de l'exposition. Ce faisant, Monsieur le Maire accède à la réalisation de l'un de nos objectifs principaux, à savoir ouvrir le foyer vers l'extérieur proche.
Cette journée du mois de mai sera l'occasion pour moi de remettre à chaque résident une oeuvre d'art signée, dont il deviendra le propriétaire légal. Le public pourra également découvrir une sélection de photographies et de dessins réalisés lors de ma résidence, ainsi qu'un court film d'animation, récit sonore et dessiné de la vie au foyer.
Mais pour que le travail puisse aboutir, il est important que nous contactions le juge des tutelles, afin de solliciter les autorisations nécessaires à la diffusion d'images représentant les résidents. Ce sont des procédures assez longues : le Tribunal d'Instance d'Épinal a un agenda chargé. Il est cependant important que nous obtenions ces autorisations pour le mois de mars, afin de pouvoir témoigner de notre expérience lors de la semaine de la santé mentale. Nous nous sommes déjà rapprochées des tuteurs légaux. Il serait dommage que cette aventure partagée soit rendue invi- sible...
Dans les mois qui viennent, vous pourrez suivre l'évolution du travail sur le blog http://foyers88.blogspot.com. Je vous invite à y poster vos commentaires, à en diffuser l'adresse, pour le faire vivre.
Veuillez agréer, Madame, Monsieur, l'expression de mes sentiments les meilleurs, ainsi que tous mes voeux pour cette nouvelle année.
Marie Bouts


UNE IMPROVISATION

Un matin, dans le hall d’accueil de l'Episome, j’ai pris la guitare. La radio habituelle, branchée quasi continuellement sur une station à tubes, s’est tue. Pas par obligation, pas par politesse. A moins que. Cet hall n’est pas très grand. Quelques sièges posés contre un mur donnent assez directement sur une petite baie vitrée où se découpe la porte d’entrée principale du foyer - porte assez lourde, assez régulièrement ouverte, et dont le son très percussif, lorsqu’elle se ferme, est un des éléments acoustiques les plus caractéristique de cet endroit. L’autre élément le plus prégnant, qu’on finit par oublier tellement il est constant, est la radio, ou le lecteur CD (les deux diffusant le même type de musique). Avec le léger ronronnement du distributeur de boisson latéral en arrière plan et les bruits parfois de la cuisine au loin, cette porte d’entrée et le poste radio sont les principales sources sonores qui n’ont pas trait directement aux corps des résidents ou du personnel. Ils forment une frise sonore, continue pour l’un (la radio), discontinue pour l’autre (la porte), que traversent les humains, avec leurs démarches, leurs voix, leurs rires, leurs cris, leurs chants parfois. Le hall est tout cela, et n’a bien souvent que faire de la politesse de la majorité des espaces communs que l’on rencontre au quotidien, qu’ils soient régis par une présence humaine dominant les manifestations sonores du lieu (comme les bruits de pas des gens dans les couloirs du métro), ou par le phénomène inverse (comme le bruit du métro lorsqu’on se trouve dans une rame en mouvement). Ici, l’équilibre est plus constant entre ces deux pôles. Plus fatiguant, aussi. Sauf pendant la nuit, il est rare que ce hall soit vide d’humains, de même qu’il est rare que la porte ne claque pas ou que la radio ne soit pas allumée. Il est même presque impossible de ne percevoir que le son des éléments environnementaux, ou que le son produits par les humains, tant l’un et l’autre sont présents en permanence. A moins que l’écoute fasse l’effort de se focaliser sur telle ou telle source sonore. Au quotidien après tout, nous faisons tous très souvent cet exercice : par exemple, écouter la parole d’une personne au sein d’un groupe où tous s’expriment en même temps. Il est assez rare cependant que nous n’ayons pas des moments pour nous reposer de ces efforts - moment d’écoute plus sereine, plus calme. Dans le hall de l’Episome, l’effort doit être quasi constant. Que la radio soit coupée après que je me sois saisi de la guitare est déjà pour moi, et peut-être pour certains résidents, un petit soulagement. Un repos. Qu’un autre espace sonore puisse naître grâce à cette intervention imprévue forme déjà une cassure dans la répétition du quotidien. Mais que je m’empresse un peu vite d'occulter ! En effet, est-ce lié à l’inscription dans mon corps du flux permanent de la radio, ou est-ce par une sorte de politesse pour atténuer la force assez radicale de son arrêt, toujours est il que mes premières minutes avec l’instrument reprennent cette idée de flux. Non plus des chansons, non plus des synthétiseurs de 1980, mais bel et bien une trame sonore improvisée, à peu près aussi homogène que celle diffusée par les deux petites enceintes du poste radio. Très peu d’interruptions, très peu de silence. Et une écoute a peu près similaire pour les résidents : à savoir une apparente indifférence. Ou plutôt la conscience que quelque chose là sonne qui ni n’empêche, ni n'interrompt, ni ne favorise la vie quotidienne. Et les discussions ou les monologues intérieurs de continuer comme si de rien n’était. Et la vie de suivre son cours, dans laquelle un guitariste (mais que fait-il là ?) a pris une place, parfois remarquée, parfois ignorée. Et mes idées musicales de s’enfermer dans l’instrument, comme seul refuge à une écoute dont je n’ai pas l’habitude qu’elle ne circule pas entre moi et les auditeurs. Ou tout du moins : dont j’ai l’habitude qu’elle soit au moins simulée (qui écoute vraiment dans un concert ?..c’est aussi difficile à dire). Ce qui me déstabilise est sans doutes aussi l’adéquation entre cette écoute peu tangible et ce que j’entends moi même de ce que je propose, qui ne me satisfait pas. Ma proposition musicale est trop proche des habitudes du lieu (un lieu de circulation avec une musique qui l’accompagne). Son impact est à la mesure de cet amalgame d’où le son ne peut rebondir. Il me faut du temps pour sortir de cette impasse. Au bout de vingt minutes peut-être, je commence à voir la possibilité d’un autre espace. Je me mets à beaucoup moins jouer. A ne plus lutter, à ne plus chercher à tracer un fil musical qui me paraîtrait cohérent, et qui voudrait transformer le réel d’une façon trop volontaire. J’essaye de saisir les rares interstices de silence du hall pour y glisser un son - un accord, un intervalle, le glissement d’un doigt sur la corde. L’espace, du coup, commence à sonner. Non pas un espace scindé entre une trame musicale et des manifestations acoustiques aléatoires, mais un espace global, où cette frontière s’estompe. Même si cela reste de l’ordre de l’intuition, je sens que pour chacun - moi-même, les résidents, un membre du personnel qui vient s’asseoir et profiter peut-être d’un climat sonore inhabituellement apaisé - quelque chose de différend se vit alors. La musique s’est faite oubliée, et c’est en la réduisant à de toutes petites unités qu’elle prend paradoxalement sa place et sa force. “Musique” n’est peut-être d’ailleurs pas le mot adéquat - trop flou, trop chargé. C’est plutôt de l’improvisation, réduite à son essence. C’est la perception d’un contexte, d’un paysage acoustique dans lequel l’art du musicien est d’inscrire le son de son instrument. Non pour ramener à lui l’écoute des gens, mais pour saisir le privilège qui lui est donné, justement, de ne pas rajouter une énième musique dans un espace qui en est saturé. Finalement, le thème musical avait été donné dans ce simple geste fait par l’un des résidents : éteindre la radio pour laisser la place à autre chose que de la radio, fut elle en forme de guitare

C'EST UN HIVER


LA SALLE DE TÉLÉVISION

Ici avec Monsieur C***


SESSION D'ENREGISTREMENT

Raphaël et MMJ***
Nous attendons l'autorisation de diffusion des images (demande faite auprès du juge des tutelles).


CHATS

Trois chats vivent au foyer : Pompon, La Démon, Mimi.
Il sont aimés.

RÉPONSE

Madame,
Je fais suite à votre courrier du 1er décembre 2009 concernant l'autorisation de diffusion d'images représentant des majeurs protégés. Concernant les personnes bénéficiant d'une mesure de Curatelle Renforcée, vous pouvez leur demander directement de signer une autorisation (pour ceux qui le peuvent) que je me ferrai un plaisir de signer à mon tour.  En ce qui concerne les personnes bénéficiant d'une mesure de Tutelle, nous sommes dans l'obligation de faire une requête auprès des Juges des Tutelles du Tribunal d'Instance (T.I.) d'Epinal pour obtenir une ordonnance vous donnant l'autorisation de diffuser leur image. J'insiste sur le fait que sans cette autorisation vous ne pouvez diffuser ces images.  Je dois également vous avertir que le TI d'Epinal est actuellement très sollicité et je ne peux donc vous garantir une réponse rapide de la part des Juges des Tutelles.  C'est pourquoi, je vous saurai gré de bien vouloir m'indiquer les personnes concernées par votre travail pour lesquelles nous exerçons une mesure de protection afin que je puisse faire parvenir les requêtes le plus rapidement possible au T.I. d'Epinal.   Comptant sur votre compréhension, je me tiens à votre disposition pour tout complément d'information.
Veuillez agréer, Madame, mes sincères salutations.
T.MUNIER

BUREAU DE DÉCEMBRE

Chez moi, pour élaborer le script.
Pour le moment, il y a peu d'éléments visibles, mais je dois tout décider : formes, structures, récit.



VU, LU, ENTENDU

Pour ce travail, j'ai lu et regardé

L'Enigme de Kaspar Hauser, de Werner Herzog
Le Sacrifice, d'Andreï Tarkovski
Le Moindre Geste, de Fernand Deligny
L'Ordre, de Jean-Daniel Pollet
Moi Un Noir, Les Maîtres Fous, Jaguar, Petit à Petit, de Jean Rouch
Elephant Man, de David Lynch
Freaks, de Todd Browning
Les Cahiers de Vaslav Nijinski
L'Anti-Oedipe, de Gilles Deleuze et Félix Guattari VOIR
Le Chant des Pistes, de Bruce Chatwin
Partition Rouge (chants des indiens d'Amérique du Nord, traduit par Jacques Roubaud)
Dieu Gît dans les Détails, de Marie Depussé
Le Son , de M. Chion

DEUXIEME SEJOUR

Du 28 novembre au 4 décembre 2009, je me suis rendue chaque jour au foyer.
Le 29-30 novembre et le 1er décembre, j'étais en compagnie de Raphaël Godeau, qui prête au projet son savoir-faire musical.
Lire le compte-rendu officiel du 15 décembre 2009

LETTRE AUX TUTEURS

Monthureux-sur-Saône, le premier décembre 2009,
Objet : demande d’une autorisation spéciale pour la diffusion d’images représentant les personnes résidant à l’EPISOME de Monthureux-sur-Saône. Projet réalisé dans le cadre d’une commande publique émise par le Conseil Général des Vosges auprès de l’artiste plasticienne Marie Bouts.
Bonjour Madame, Bonjour Monsieur,
Je me tourne aujourd’hui vers vous parce que vous êtes la tutrice ou le tuteur de l’une des personnes avec qui je travaille, à l’EPISOME de Monthureux-sur-Saône.
Vous n’êtes certainement pas sans savoir que 28 résidents ont perdu la totalité de leurs biens lors de l’incendie qui a emporté deux ailes du foyer, le 20 mai dernier. A la suite de cet événement douloureux, qui a profondément marqué tous les usagers de l’EPISOME, le Conseil Général des Vosges, désireux de substituer au processus de destruction l’amorce d’un renouveau, a imaginé une association entre l’EPISOME et un artiste plasticien. C’est ainsi que depuis le mois de septembre, je travaille avec la ou les personnes dont vous êtes tutrice/ tuteur : je recueille les souvenirs, je reçois les récits du présent, je rencontre la communauté telle qu'elle s'est réorganisée depuis l'incendie.
Le processus que j’ai engagé avec les résidents est un processus lent, fondé sur le lien, sur l’écoute. Il s’agit avant tout d’une rencontre, entre eux et moi. Je concentre mes séjours dans des durées d’une à deux semaines, pendant lesquelles je me rends quotidiennement à l’EPISOME. Lors de ces visites, je photographie, je dessine, je m’entretiens avec les résidents (entretiens enregistrés) : ils me parlent de leurs vies, de leur quotidien, par des mots, des sons, des gestes, des musiques.
Chaque photographie que je prends, chaque dessin que je réalise, chaque parole que j’enregistre sont des captations consenties. Les appareils (microphone, appareil photographique) sont toujours visibles, et même signalés. Chaque fois que cela est nécessaire, je réexplique les raisons de ma présence, avec des mots simples. Les résidents ont la possibilité d’écouter leurs voix (au casque) quand je les enregistre, de regarder les photos que j’ai prises, et de me dire si elles leur plaisent ou non : ils ont leur mot à dire, concernant leur image. Je communique périodiquement mes recherches à Maryse Moreau, qui représente le Conseil Général, et à Monica Deflesselle. Ensemble, nous décidons des orientations du projet.
Dès l’origine, les personnes qui travaillent à l’EPISOME, Madame Deflesselle et Monsieur Mytych en tête, en leur nom et au nom des résidents, ont témoigné de leur désir d’ouvrir le foyer vers l’extérieur. Je me joins à eux pour porter, vers le dehors, avec ma sensibilité et mon savoir-faire, l’histoire collective que les résidents me confient.
Aujourd’hui, après trois mois de travail, voici ce qu’il en est : je souhaite réaliser un diaporama (son et images) à partir du matériel photographique et sonore collecté sur place. Je souhaite raconter la vie au foyer, transmettre les paroles, précieuses, que me confient les résidents. Être soi-même, posséder des biens, avoir conscience du temps, de l’espace, vivre avec les autres, être beau, être « stylé », être reconnu pour ce que l’on est : voilà ce que j’entends et voilà ce dont je veux parler, dans ce diaporama.
Pour construire ce récit, je souhaite utiliser des photographies et des
extraits d’entretiens qui m’ont été accordés par la ou les personnes dont vous avez la responsabilité : pour cela, j’ai besoin de votre accord. Il s’agirait là d’une autorisation exceptionnelle, qui ferait l’objet d’une convention entre le résident, moi-même et le Conseil Général des Vosges, pour ce projet spécifique.
Je joins à cette lettre une copie de mon CV : à ce jour, j’ai réalisé de nombreuses pièces (fresques, expositions, performances) et publié plusieurs livres sur le même mode (immersion dans des communautés particulières, pour en transmettre l’histoire). J’ai travaillé en 2007, 2008 et 2009 avec le Conseil Général des Vosges sur un projet de recueil d’histoires auprès des résidents de neuf maisons de retraite (voir le livre Pays). Si vous désirez en savoir plus sur mon travail en général et sur ce projet en particulier, je me tiens bien évidemment à votre disposition.
En espérant que vous serez sensibles à cette demande et dans l’attente de votre réponse, veuillez agréer, Madame, Monsieur, l’expression de mes sentiments les meilleurs.
Marie Bouts

LA MAIN DANS LE CHAPEAU



cf. dictionnaire historique de la langue française

COMPTE-RENDU OFFICIEL N°2

Lille, le 15 décembre 2009
Objet : commande publique / réalisation d'une oeuvre d'art pour le foyer d'hébergement (EPISOME) de Monthureux-sur-Saône.
Eclairage N°2.

   Bonjour Madame, Bonjour Monsieur,
Depuis le mois de septembre, vous suivez le cours du projet artistique que je mène au foyer d'hébergement pour personnes handicapées, à Monthureux- sur-Saône. Vous savez désormais comment je travaille : j'alterne les séjours en immersion à l'EPISOME, et les sessions de travail à mon domicile. Pendant les périodes d'immersion, je photographie, je dessine. Les résidents m'accordent des entretiens, que j'enregistre.
Chaque nouvelle visite au foyer augmente la quantité de matière collectée (j'arrive aujourd'hui aux alentours des 2000 photos, et je ne compte plus les heures d'enregistrement). Pendant les sessions de travail à domicile, je reviens dans cette matière, je la trie, je la retravaille, pour réaliser l'oeuvre que vous m'avez commandée.
Depuis septembre, le projet évolue et se précise en fonction de mes interlocuteurs, les résidents du foyer, en fonction des attentes que formule la chef de service, Madame Deflesselle, au nom de l'équipe et au nom des résidents, en fonction de la parole que porte Maryse Moreau, à chacune de nos rencontres.
De ces convergences, deux pistes claires se dégagent : OUVRIR le foyer vers l'extérieur REDONNER aux résidents la matière qu'ils m'ont confiée, transformée.
Chaque résident dit son histoire à sa manière. Pour certains, ce sont quelques mots, ou bien uniquement des gestes, des sons. Pour d'autres, ce sont de longs récits. Je compose avec ces poétiques : les structures des histoires que l'on me confie sont hétérogènes – esquisses mouvantes, rythmiques signifiantes, dessins marmonnés, balancements appuyés, errances des corps, des regards, rituels adressés, etc. C'est avant tout un quotidien que nous vivons ensemble : des relations se nouent, je les retranscris au mieux de mes outils et de ma subjectivité.
Partant de ces présences, parfois sibyllines, j'ai aujourd'hui acquis la certitude que la forme la plus adaptée pour retransmettre ces histoires mêlées, ces vies, est un film/diaporama, qui mêle images (dessins, photographies) et sons (entretiens enregistrés, compositions musicales).
Forte de mon expérience passée, en maison de retraite et ailleurs, je sais déjà que le travail est loin d'être fini : il s'agit pour moi de donner son temps à la dernière phase de réalisation, celle de la mise en forme.
J'estime le temps de travail restant à trois mois (janvier-mars) : archivage et mise en perspective des données collectées, écriture du script, réalisation et montage de séquences dessinées (animation), réalisation et montage des séquences photographiques (diaporamas), sélection et montage des séquences audio, composition musicale (bande-son). Pour réaliser cette bande-son, je travaille avec un musicien, Raphaël Godeau.
Voici les stratégies que nous avons retenues pour OUVRIR et REDONNER ce travail :
Réaliser un film/diaporama qui parle autant au habitants du foyer qu'aux « étrangers » : un objet rythmique, poétique, qui raconte le quotidien à l'EPISOME. Les objets (dessins, photographies, marionnettes, enregistrements sonores, etc.)qui auront servi à réaliser ce film seront redistribués aux résidents : une oeuvre par personne (50 personnes vivent au foyer). Chaque oeuvre sera signée et remise à son propriétaire lors d'une cérémonie officielle, publique, qui aura lieu dans le village de Monthureux-sur-Saône (avril?). Ainsi, les habitants du foyer détiendront les objets que j'ai réalisés en les rencontrant. Cette cérémonie publique sera l'occasion d'exposer les oeuvres remises aux résidents et de projeter le film/diaporama.
Par ailleurs, pour avancer conjointement et à distance pendant les mois de janvier à avril, j'ai mis en place un blog (http://foyers88.blogspot.com) qui permettra aux diverses personnes qui prennent part au travail en cours de communiquer sur les avancées de ce projet : L'EPISOME, le CG88 et moi-même. Ce blog sera à la fois un outil de travail et un moyen de communication. Il permettra de donner de l'ampleur au projet, d'étoffer ses différents aspects (social, culturel, artistique), de mettre à jour un processus de mise en relation entre différents pôles de travail.
Enfin, dans la perspective de faire voyager cette expérience singulière, Madame Deflesselle, chef de service à l'EPISOME, a d'ores et déjà engagé notre participation à la semaine de la santé mentale, du 15 au 21 avril 2010, dans les Vosges (très certainement sous la forme d'une projection).
Sincères salutations,
Marie Bouts


PREMIER SEJOUR

Du 11 au 23 octobre 2009, je me suis rendue chaque jour au foyer.
J'y ai rencontré ceux qui y vivent, ceux qui y travaillent.
L'accueil a été chaleureux, et le séjour, intense.
Lire le compte-rendu officiel du 4 novembre 2009

LES HLM

Certains résidents ont été relogés, dans des H.L.M., à 500mètres, environ, du foyer.
Pour eux, c'est une indépendance.